Un billet #25
Biblio
Ma bibliothèque est composée de centaines de livres. Ils sont répartis sur des étagères dans presque toutes les pièces de l'appartement. Dans la salle à manger, car les livres se mangent, se savourent, se dévorent parfois et peuvent donner à être croqués. On en trouve dans ma chambre, alignés sur des étagères, ils m'apportent réconfort, tendresse, leur présence me rassure et m'aide à trouver le repos. Je n'ai qu'à tendre le bras, quand le soir, transi de fatigue, je ne sais quoi lire. Mon choix se fait alors rapidement, puisque ma lecture sera de quelques minutes, tout au plus, avant que je m'effondre et me laisse glisser vers des mondes oniriques. La salle de bain en abrite également deux ou trois, radeaux échoués, proches de la baignoire, abandonnés provisoirement et piégés de m'avoir suivi de trop près avant ma toilette. Ils ne semblent pas m'en vouloir de cet abandon, ils savent qu'il n'est que provisoire et qu'à l'occasion, ils pourront retrouver l'intérêt que j'ai pour eux. On ne trouve pas de livre dans mes toilettes. Je trouve cet endroit inapproprié à la lecture ou de dépôt d'un livre, même quelconque. Souvent j'observe mes livres, de loin, ou alors, je m'en approche et passe en revue, tête penchée, les titres et les auteurs venus s'inviter chez moi. J'ai le plaisir de redécouvrir les livres que j'ai lus, lesquels font renaitre des émotions, des sentiments, le plaisir ressenti ou l'indifférence, souvent une époque à laquelle cette découverte s'est faite. Je refais également connaissance avec d'autres dont je sais que je ne les ouvrirai jamais, mais pour lesquels, allez savoir pourquoi, j'ai une affection particulière pour l'auteur qui fait qu'ils continueront, encore pour longtemps, à hanter les lieux. Je me plais à imaginer ces millions de mots, ces propositions contenues, sortir insidieusement de leur carcan de papier, des parallélépipèdes dans lesquels ils sont enfermés, se mélanger, pour construire de nouvelles phrases, tournures, récits, poèmes encore jamais écrits, dans leur volonté d'indépendance, créateurs d'un esprit propre, autonome, libéré de la gangue de la forme et de la règle. Peut-être ces récits existent-ils d'ailleurs, autrement que de papier, qu'ils planent, hantent les lieux, fantômes bienfaisants, patients d'être saisis, infusés, disciplinés, ordonnés, laissant croire que l'idée viendrait de moi et riant des tours qu'ils viennent de me jouer.